Longtemps j'ai voulu, pour être heureux, réprimer mes désirs, me passer même l'envie de trouver l'âme soeur, tant la tâche semblait impossible. Je suivais le principe d'Epicure, selon lequel la liberté s'acquiert par la destruction du désir, non par sa satisfaction. En effet quand un désir est satisfait, un autre apparaît, et ainsi de suite. Vivre dans le désir est donc assurément, pour Epicure, en être esclave. Hors suivant ce principe, je ne constatai aucunement en moi un sentiment de liberté, ni même de bonheur. J'en ai acquis en tout cas beaucoup plus le jour où je me suis persuadé que le désir que je ressentai en moi était normal, naturel, et que le réprimer n'était alors qu'une envie non avouée de mourir.. Le désir est donc bien l'état normal de l'homme heureux de vivre : désir du corps, mais aussi désir du coeur et de l'esprit. Le désir n'est pas une soumission à l'instinct, mais une attirance naturelle qui anime tout l'être. Réprimer le désir, c'est se soumettre à des contraintes morales stupides, irréalistes, et c'est cela qui constitue le véritable esclavage ! On remarque que la repression du désir et souvent corrélé à un autre opression, politique ou religieuse. Par exemple autrefois on condamnait l'amour hors du mariage car celui-ci compromettait l'autorité paternelle, familiale, sociale et fesait tord à l'ordre bourgeois... Le désir n'est pas péché, puisqu'il apporte une gratification physique, mentale ou émotionelle lorsqu'il est satisfait. Etre libre, c'est s'accomplir en tant qu'humain, qui est un être de désir. Cela dit, il n'est pas non plus interdit d'être réaliste, et admettre que parfois, le désir ne peut être satisfait : c'est ce que Freud appelle l'interaction entre le principe de plaisir et principe de réalité.